Oubliez-moi
Xu Feng, récit traduit du chinois par Kevin Henry
Née en 1912 dans une famille de propriétaires terriens, aisés sans être fortunés, de la province chinoise de Jiangsu, Qian Xiuling montre tôt de grandes dispositions pour l’étude. Admiratrice de Marie Curie, elle parvient à convaincre son père de l’envoyer étudier à l’étranger. Celui-ci accepte le sacrifice de l’envoyer à Louvain, parce que le fils d’un ami, qu’on lui destine pour époux depuis sa naissance, y étudie. Qian Xiuling quitte donc la Chine à l’âge de 17 ans. Féministe avant la lettre, elle rompt aussitôt avec ce fiancé qu’elle n’avait jamais vu et qui ne lui plaît pas. Étudiante brillante, elle va obtenir un double doctorat en physique et chimie et épouser un médecin
belge d’origine gréco-russe, Grégoire de Perlinghi. L’invasion japonaise coupe court à leur projet de s’établir en Chine. Ils s’installent à Herbeumont, où la guerre les surprend.
Suite à une action de sabotage, Qian Xiuling, risquant elle-même d’être prise pour une «terroriste», va sauver la vie de résistants du village en allant plaider leur cause auprès du général von Falkenhausen, gouverneur militaire de la Belgique. Celui-ci, en effet, a bien connu un de ses cousins, général du Kuomintang. Elle fera de même plus tard en sauvant la vie de plus de 100 otages d’Écaussines. Décorée à la Libération, faite citoyenne d’honneur d’Écaussines, devenue enfin assistante à l’université de Louvain, elle va quitter son emploi et risquer sa réputation
pour défendre von Falkenhausen devant le Conseil de Guerre, lui évitant la condamnation à mort.
Qian Xiuling ne connaîtra jamais la carrière scientifique qu’elle ambitionnait, mais elle ouvrira bientôt et dirigera jusqu’à sa mort en 2008 le plus prestigieux restaurant gastronomique chinois de Bruxelles, La Fontaine de Jade.